Un petit coup de gueule, si vous permettez. Il semblerait que la femme qui veuille s'occuper d'elle devienne de plus en plus la cible des nouveaux moralistes. Qui sont-ils ? Aucune particularité socio-professionnelle, on en trouve partout. Ce sont des personnes, de sexe féminin ou masculin, qui crient au scandale, s'insurgent, s'effondrent au moindre signe extérieur de coquetterie. Chantres du "nude" (effet peau nue) leur credo est : "On peut faire des choses en esthétique, mais il ne faut surtout pas que ça se voit." Comprendre : seul votre banquier saura que vous dépensez des fortunes pour soigner votre image.
Au cours d'une conversation récente, le sujet tourne autour des femmes qui font des interventions d'esthétique au point que cela se remarque. La faute. Dans la conversation, j'identifie immédiatement un nouveau moraliste qui s'écrit : "C'est scandaleux ces femmes qui se font faire des injections dans les lèvres. Quelle tête elles ont ! On dirait des femmes dont c'est le métier." Il m'a semblé que se faire traiter ainsi pour des lèvres injectées, c'était cher payer la bouche de canard.
Autre dialogue quelques jours plus tard : "Oui, vous pensez, certaines mettent plusieurs centaines d'euros dans un pot de crème alors que d'autres gens meurent de faim ! " Il faudra m'expliquer le modèle économique qui permettrait que chaque euro qui n'aille pas dans un pot de crème finisse directement dans la bouche de quelqu'un qui a faim. Faut-il rappeler que la cosmétique crée des milliers d'emplois chaque année ?
Dernier échange en date, cette fois sur un célèbre réseau social : une vidéo était mise en ligne par un ami. Elle montrait une boutique de mode à l'ouverture et sur le point de présenter une nouvelle collection très prisée. À peine la grille du magasin relevée, on y voit les clientes se ruer avec… énergie (d'accord, limite hystérie) et arracher avec fougue les vêtements des cintres. Commentaires des amis (et nouveaux moralistes) sur le réseau social : "Je suis effondré", "Affolant", "Dramatique". Je m'en suis frotté les yeux, et j'ai visionné la vidéo une deuxième fois. Une personne se serait-elle faite frapper sans que je la vois ? une vieille dame poignardée ? un jeune agressé ? Non, c'était juste des filles en train de faire des courses. Là encore, nous n'avons pas la même notion du dramatique.
Alors voilà, j'aimerais que l'on fiche un peu la paix à ces filles qui se ruinent en soins, se crêpent le chignon pendant les soldes et dont les mères se font piquer les contours de la bouche car elles n'ont pas envie d'avoir des têtes de grand-mère. Fichons-leur la paix ! Elles ne font de mal à personne, dépensent de l'argent et par là-même créent des emplois. Elles ont juste envie de se faire plaisir, et c'est leur droit. Certaines travaillent, ont parfois des enfants, et méritent mieux que d'être réduites à de folles dépensières superficielles, comme le font nos nouveaux moralistes, qui n'ont décidément que ça à faire.
par Clara Ousset Masquelier