Les services officiels nationaux (DGC-CRF, DSV) qui procèdent au contrôle des entreprises et s'assurent que celles-ci procèdent à la mise sur le marché de produits sûrs, sains et loyaux sont assujettis à des exigences strictes qui sont définies à la fois par la réglementation communautaire (règlements CE n° 882- 2004 et 854-2004) et par des textes nationaux (Code de la consommation, Code rural).
Cette réglementation impose aux services officiels une méthodologie détaillée dans le prélèvement des échantillons, dans les méthodes d'analyse et dans la démonstration de l'expertise des laboratoires officiels qui procéderont aux analyses. Ils doivent aussi respecter le droit des entreprises contrôlées de réclamer une contre-expertise lorsqu'elles ne sont pas d'accord avec les résultats officiels. Le fait par les services officiels de ne pas respecter cette méthodologie peut entraîner la nullité de leurs analyses.
Les analyses d'auto-contrôle
Toute entreprise du secteur alimentaire doit mettre en œuvre une démarche d'auto-contrôle (art. 17 règlement CE n° 178- 2002). Cela est plus particulièrement vrai pour le responsable de la première mise sur le marché (art. 212-1 Code de la consommation).
Les analyses constituent un des outils de l'auto-contrôle, qu'elles portent sur le contrôle des matières à réception, celui des produits intermédiaires et / ou des produits finis. Ces analyses permettent de justifier auprès des services officiels que l'entreprise s'est dotée de moyens suffisants pour éviter des nonconforrnités. En cas de défaut non décelé à l'analyse, le fait d'en avoir régulièrement effectué permet, à certaines conditions, d'échapper à sa responsabilité pénale (Crim., 7 octobre 2008). Les conditions dans lesquelles sont effectuées ces analyses d'auto-contrôle (prélèvements, plan d'échantillonnage, méthodes d'analyse) sont essentielles pour démontrer la pertinence et la fiabilité des résultats.
Les analyses réalisées en France
C'est la raison pour laquelle la France a fixé des exigences en matière d'autocontrôle pour les produits végétaux, les végétaux, les aliments pour animaux, les denrées animales ou d'origine animale. Ces exigences sont définies aux articles R 201-12, R201-13 et R202-2 et suivants du Code rural.
Ces textes réglementent la manière dont un échantillon est identifié et acheminé, le délai de conservation des analyses et, surtout, le fait que seuls certains laboratoires (les laboratoires reconnus), dont la liste est fixée par arrêté ministériel, peuvent effectuer les analyses d'autocontrôle. La reconnaissance de ces laboratoires s'effectue par décision du préfet du département où le laboratoire est implanté et ce, pour une durée de cinq ans. Ces laboratoires reconnus ont alors des obligations réglementaires qui leur fixent des conditions à respecter pour procéder aux analyses.
Les analyses faites dans d'autres États membres
Les analyses d'auto-contrôle effectuées par des fournisseurs d'autres États membres ne sont pas reconnues par le juge français, pour qui elles n'ont aucune valeur. Sont reconnues, en revanche, les analyses des services officiels ou des organismes agréés par eux, ainsi que les analyses faites par des laboratoires accrédités. Ce sera encore plus le cas lorsque le règlement CE n° 765-2008 du 9 juillet 2008 entrera en vigueur (le 1 er janvier 2010), car ce texte instaure pour la première fois une réglementation de l'accréditation, qui comprend notamment la reconnaissance mutuelle des travaux des laboratoires accrédités. Ainsi, une société française aura le droit de se fonder sur les résultats d'une analyse d'un laboratoire allemand accrédité par les autorités compétentes de son pays pour effectuer l'analyse en question.
Les analyses faites dans des pays tiers
Aucune analyse effectuée dans des pays tiers n'a la moindre valeur pour le juge français. Cela signifie qu'un importateur ne peut jamais se fier aux analyses faites au départ dans ces pays, quelle que soit la compétence du laboratoire qui y a procédé, même si celui-ci est accrédité dans son pays. En effet, il n'existe, du point de vue juridique, aucune reconnaissance internationale des systèmes d'ac créditation. Cela signifie, en pratique, que l'importateur sera tenu de refaire des analyses sur les produits à leur arrivée en Europe pour être en règle avec ses obligations de premier metteur sur le marché.
Les analyses contractuelles
L'analyse est essentielle également dans les relations fournisseur / client de la chaîne alimentaire. Elle permet de s'assurer que l'ingrédient ou la denrée alimentaire vendus sont conformes à la réglementation, ainsi qu'aux exigences contractuelles de l'acheteur. Il est important de prévoir plusieurs choses dans les contrats et cahiers des charges à propos des analyses, pour éviter les litiges. Il est, par exemple, intéressant de choisir d'un commun accord le laboratoire qui fera les analyses pour le compte de l'acheteur et du vendeur et de définir les méthodes de prélèvement d'échantillons et d'analyses à appliquer.
Ainsi, si le laboratoire détecte un défaut, il n'y aura plus de contestation possible, alors que ce sera le cas si chaque partie fait réaliser de son côté ses propres analyses. En revanche, il est dangereux d'imposer à son partenaire son plan d'auto-contrôle, ce qui constitue une immixtion dans sa gestion du risque sanitaire, qui peut créer un risque de co-responsabilité.
Conclusion
L'analyse est au cœur des problèmes de sécurité et de conformité des aliments. Il faut donc veiller avec le plus grand soin à ce qu'elle soit correctement effectuée... ce qui est loin d'être toujours le cas.
Antoine de Brosses,avocat au barreau de Paris(Simmons et Simmons)